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La coopérative à la une Union de la Scarpe, une coopérative presque familiale

Eric Savary (à g.), à la direction de l'Union de la Scarpe depuis plusieurs décennies, et en train de passer la main, au côté d'Alexis Ficheux, 32 ans, fraichement élu président.

De taille modeste, la réussite de l’Union de la Scarpe, dans le Pas-de-Calais, repose sur plusieurs atouts ; la proximité avec les adhérents, la disponibilité de ses équipes, des finances saines et un coût d’intermédiation assez faible. Alors qu’un nouveau président a été élu et qu’un nouveau directeur général prend le relais, elle affiche de nouveaux projets.

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L’Union de la Scarpe pourrait presque être qualifiée de coopérative « familiale » et ce pour deux raisons. La première est parce que les relations entre les salariés et les agriculteurs peuvent être considérées comme familiales. « Ici, tout le monde se connaît et s’appelle par son nom, et même son prénom, souligne Alexis Ficheux qui a été élu en mars dernier, à 32 ans, président de la coopérative, après avoir été trois ans administrateur, à la suite de Bruno Cordier qui n’avait pas souhaité se représenter. Les adhérents recherchent avant tout un contact humain, et notre premier atout est notre proximité avec les agriculteurs. »

Si l’Union de la Scarpe fait penser à une coopérative « familiale », c’est aussi parce qu’elle est dirigée depuis sa création par la même famille, celle des Savary. « C’est mon arrière-grand-père, Cléry Savary, qui a fondé l’entreprise en 1900, à l’époque sous forme de négoce, narre Eric Savary, qui dirige la coopérative depuis trente-huit ans. En 1933, après une période très difficile pour la vente des céréales, l’entreprise familiale a été transformée en coopérative avec l’appui des agriculteurs des environs. » C’est ainsi qu’est née l’Union de la Scarpe à Rœux, près d’Arras, dans le sud-est du département du Pas-de-Calais. « Mon grand-père, qui se prénommait aussi Cléry, lui a ensuite succédé et a démarré en 1940 une activité appro en parallèle de la collecte de céréales, précise-t-il. À partir de 1965, mon père, Robert Savary, a repris le flambeau, aidé par ma mère, qui assurait l’accueil, le secrétariat et la comptabilité. » Quand le couple a pris sa retraite en 1984, Eric Savary, son diplôme de gestion et comptabilité en poche, est entré à son tour dans la coopérative, pour y prendre les rênes, jusqu’en 2023.

La reprise d’un deuxième site

À l’époque, la coopérative ne disposait que d’un seul site, à Rœux, son siège actuel. Elle fonctionnait avec un salarié à temps plein et un à mi-temps en plus de Robert Savary et de son épouse, et collectait 8 000 tonnes de céréales par an. Depuis, l’Union de la Scarpe a bien évolué. « Nous collectons aujourd’hui entre 18 000 et 20 000 t de céréales par an, essentiellement du blé tendre, indique Eric Savary. Nous avons pour cela agrandi nos installations à Rœux en construisant un nouveau silo à 200 m du siège, et nous disposons d’un deuxième site à Vis-en-Artois, à 8 km. Nous avions en effet racheté en 1994, à la coopérative voisine, A1 (aujourd’hui Unéal), les installations de l’ancien négociant, Ardaens. » Au total, l’Union de la Scarpe s’appuie sur des capacités de stockage de 13 000 t à Rœux et 5 000 t à Vis-en-Artois. La majeure partie des céréales est livrée à la moisson ; un quart des ventes sont réalisées au prix moyen, les trois quarts des céréales sont vendus à prix ferme ou sous forme de contrats sur le marché à terme.

Indépendante en commercialisation

La coopérative a la chance d’être implantée au cœur de l’Artois, dans une région à haut potentiel et au climat tempéré, très favorable aux grandes cultures. La taille des exploitations se situe en moyenne autour de 70 à 100 ha, mais varie dans une fourchette de 30 à 300 ha.

« Si les agriculteurs continuent à faire confiance à une coopérative de taille modeste comme la nôtre, c’est parce qu’elle fonctionne bien sur le plan financier, et que les adhérents veulent garder une certaine indépendance vis-à-vis des grands groupes, souligne Alexis Ficheux. Nous avons gardé le mode de fonctionnement d’une vraie coopérative comme au moment de leur création. Nous jouons le jeu des compléments de prix et des ristournes sur les appros, en toute transparence. C’est la mission première d’une coopérative. » Comme la plupart des installations de l’Union de la Scarpe sont amorties, le coût d’intermédiation est assez limité.

« Nous sommes aussi restés complètement indépendants sur le plan de la commercialisation des céréales, et nous travaillons avec des courtiers », ajoute le président. La coopérative exporte une grande partie de sa production vers le Benelux. Elle a des relations privilégiées avec deux négociants belges pour le blé et l’orge fourragère, et travaille plutôt avec la France et les Pays-Bas pour l’orge de brasserie. Si, autrefois, les expéditions étaient surtout assurées par péniches, aujourd’hui, elles se font essentiellement par camions.

Sur le plan de l’approvisionnement, l’Union de la Scarpe adhère depuis 1986 à la centrale d’achat Sicapa devenue Inoxa. « Une façon pour nous de bénéficier de prix équivalents à ceux des structures plus importantes, surtout pour les produits phytosanitaires, remarque Eric Savary. Sur le plan technique, nous sommes aussi membres d’Inoxatech, le pôle d’expérimentation des coopératives d’Inoxa. » Au niveau national, l’Union de la Scarpe adhère au groupe InVivo.

Un nouveau duo

« Une coopérative qui n’évolue pas est une coopérative condamnée à disparaître, estime le nouveau président. Pour les dossiers en cours, j’ai la chance de pouvoir m’appuyer sur le vice-président Gérard Honoré, qui a tout en main. » Jeune agriculteur de Haucourt, Alexis Ficheux, qui a repris l’exploitation de ses parents après des études d’ingénieur UniLaSalle Rouen, est probablement l’un des plus jeunes présidents de coopérative de France. « Mon objectif, en acceptant cette responsabilité, est d’aller à la rencontre des jeunes agriculteurs, pour leur rappeler les atouts de notre coopérative et les inciter à adhérer chez nous. Je souhaite également encourager les technico-commerciaux à faire découvrir la coopérative à de nouveaux adhérents potentiels. » Son souhait est aussi de moderniser la coopérative. À ce titre, les silos viennent d’être informatisés et les TC viennent de bénéficier d’un ordinateur avec de nouvelles fiches adhérents et fichiers à jour de gestion des stocks, livraison…

Alexis Ficheux n’est d’ailleurs pas le seul nouveau dirigeant à la tête de la coopérative. Comme Eric Savary a fait valoir, à partir de cet été, ses droits à la retraite, le conseil d’administration de la coopérative a choisi de faire appel à Jérôme Lobbedez, directeur général de la coopérative de Saint-Hilaire-lez-Cambrai (Nord), pour lui succéder, en assurant la direction en même temps des deux structures.

« Je reste salarié de la coopérative de Saint-Hilaire, précise ce dernier, et la coopérative va me mettre à la disposition de l’Union de la Scarpe l’équivalent de deux jours par semaine. » Et c’est avec beaucoup d’enthousiasme qu’il a accepté cette nouvelle mission. « Les deux coopératives sont voisines et amies de longue date, indique-t-il. Nous avons investi ensemble il y a une douzaine d’années, dans un équipement de triage à façon des semences que nous proposons sous forme de prestation de service aux agriculteurs. Nous mettons en place en commun une plate-forme d’essais variétés, désherbage et protection. La coop de Saint-Hilaire achète l’ensemble du colza produit par l’Union de la Scarpe, pour le transformer et produire de l’huile. Nous organisons nos réunions techniques en commun. Il y avait donc une certaine logique à ce qu’on me demande d’assurer la direction de l’Union de la Scarpe, aujourd’hui ». À ses yeux, la coopérative du Pas-de-Calais est une « structure familiale, dynamique et professionnelle qui sait écouter ses adhérents et s’adapter à leurs demandes ».

Des projets à deux ou trois ans

C’est pour cette raison que le conseil d’administration a décidé de moderniser son site de Vis-en-Artois. « Imbriqué dans les maisons voisines, il n’est plus adapté à la taille des tracteurs, remorques et camions d’aujourd’hui, constate Alexis Ficheux. Nous avons décidé de nous doter d’un nouveau site avec stockage des céréales et magasin d’approvisionnement. » Le projet devrait voir le jour d’ici deux à trois ans.  « L’Union de la Scarpe s’appuie sur une équipe jeune, prête à évoluer, conclut son nouveau directeur. Je me donne quelques mois pour regarder ce qui va très bien, et ce qui peut être amélioré, toujours dans l’objectif de répondre mieux encore aux besoins de l’adhérent. »

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